C’est l’histoire d’un caillou oublié dans les collections du musée de Toulon et du Var. Il y a quelques années, Stephen Giner, conservateur dudit musée, observe la présence de dents à la surface d’un bloc découvert il y a quelques temps dans des roches du Crétacé inférieur qui affleurent près du Siou Blanc, au nord du Beausset dans l’arrière-pays de Toulon. Stephen montre alors le spécimen à Eric Buffetaut qui constate la présence d’un capuchon d’émail hyperminéralisé à l’apex des dents, un caractère qui trahit la nature ichthyenne de l’animal.
Le spécimen est transféré alors au muséum de Genève qui accueille volontiers les poissons fossiles en quête d’identité. Mais à part ces quelques dents, d’ailleurs très jolies et fort grandes pour un poisson, pas grand-chose d’autre de l’animal n’est visible. On entreprend de dégager le reste du fossile à l’acide. Cette technique, régulièrement utilisée pour préparer des fossiles de vertébrés, consiste à plonger le spécimen dans un acide dilué, dont la nature dépend de la matrice, de façon à dissoudre la roche carbonatée sans attaquer le fossile qui est, lui, phosphaté et donc inattaquable (en principe du moins). C’est rapide à dire, mais c’est long à faire… Pierre-Alain Proz, collaborateur scientifique au département de géologie et paléontologie du muséum de Genève, entreprend l’opération. Le bloc est plongé pendant plusieurs heures dans un bain d’acide, puis il est rincé à l’eau pendant plusieurs heures, séché, les parties du fossile nouvellement dégagées sont consolidées, et l’opération recommence. Après quelques mois de ce traitement, la roche disparaît et le fossile apparaît, pour notre plus grand plaisir. Comme la taille initiale du bloc le laissait prévoir, un poisson entier n’est pas apparu miraculeusement. Mais un joli fragment de mâchoire, avec plein de dents partout, s’est dévoilé. Lire plus…