Des images de dinosaures avec la queue qui traîne par terre nous encombrent le cerveau, mais les lecteurs fidèles du DinOblog savent bien que ces représentations archaïques ne sont que billevesées et coquecigrues : voilà bien longtemps que les paléontologues ont renvoyé ces vieilleries aux oubliettes de la science ! Avec notamment un argument massue, de ceux qui ratatinent d’un coup l’adversité : on connaît des milliers de pistes de dinosaures fossilisées sans la moindre trace d’une grosse queue traînant au milieu des empreintes de pas. Et donc les dinosaures se baladaient en tenant leur appendice caudal bien au-dessus du sol. Et toc !
Oui mais… nous rappellent ces jours-ci les paléoichnologues Jeong Yul Kim et Martin Lockley.
Oui mais on connaît aussi quelques traces de queues de dinosaures ! Oh pas beaucoup, nos deux compères en ont recensé une petite trentaine de par le monde. Et encore, certaines de ces traces ne sont sans doute pas des traces de queue de dinosaure mais des traces laissées par un pied traînant dans la boue ou… par un crocodile passant au même endroit que le dinosaure ! Mais il en reste encore un petit nombre (soit une vingtaine sur des milliers de pistes anoures) qui semblent bien être d’indubitables traces de queue de dinosaures, si bien conservées que les chevrons (ces petits os que l’on trouve sous les vertèbres caudales des dinosaures) ont parfois laissé une marque dans le sédiment. Alors comment concilier ces infects petits faits avec la belle théorie exposée en préambule ?
Précision utile : la trace de queue de sauropode est rarissime (2 exemples, et encore…) mais les traces de queues de théropodes et d’ornithopodes, des dinosaures bipèdes, sont un peu moins rares. Pour les autres groupes de dinosaures circulez, y’a rien à voir ! Alors bien sûr il y a trace de queue et trace de queue. Plus exactement la trace d’une queue posée sur le sol (celle laissée par un dinosaure couché de tout son long dans la boue, le gros dégoûtant) et la trace de queue laissée durant le déplacement du dinosaure. Fidèle à mon sacerdoce d’apprendre des mots utiles à mes lecteurs, je précise que les premières sont des cubichnia (traces laissées au repos) ou des « tail impressions » (empreintes de la queue) alors que les secondes sont des repichnia (traces de locomotion) ou « tail drag impressions » (empreintes de la queue qui traîne sur le sol).
Bien entendu si les cubichnia sont d’un grand intérêt pour mieux connaître l’anatomie de nos dinosaures, ce sont plutôt les repichnia qui nous perturbent, car comment un dinosaure pouvait-il avoir le mauvais goût de laisser traîner au sol une queue dont nous sommes bien certains qu’elle devait fièrement tenir en l’air ? Voilà voilà… Et bien là Kim et Lockley sont moins diserts, tout à coup. Leur tentative d’explication c’est que ces bestioles bipèdes s’accroupissaient régulièrement et que comme les pistes à queues sont celles d’animaux se déplaçant très lentement un animal distrait venant de se relever pourrait avoir conservé pendant quelques mètres une posture un peu maladroite…
On ne pourra néanmoins s’empêcher de penser que si certains dinosaures s’en allaient la queue basse, c’est parce qu’ils étaient tristes. Pas moi puisque, la saison touristique s’achevant au Musée des Dinosaures, je pars (enfin) en vacances…
Jeong Yul Kim & Martin G. Lockley (2013) Review of Dinosaur Tail Traces, Ichnos, 20, 129-141
Publié dans : Ornithopode,Paléoichnologie,Théropodes
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